2.1 Quelques définitions

Un outil est un objet – non nécessairement façonné par l’homme – qui augmente la capacité d’un agent à opérer dans un environnement donné (que ce soit pour agir ou mieux le percevoir), alors qu’un artefact est un objet façonné par l’homme selon une certaine conception préexistante de forme (Ingold, 1993). Ingold souligne que tous les outils ne sont pas des artefacts, car ils ne sont pas tous modifiés intentionnellement, et vice versa : un gâteau est un artefact mais pas un outil, alors qu’une pierre faisant usage de serre-livres est un outil sans être un artefact. Un outil ne serait rien sans la technique : pour Ingold, un objet devient un outil grâce à une technique, une habileté à l’utiliser. À la distinction outil-artefact précédente, nous pouvons ajouter une deuxième, fonctionnelle : les objets utilisés comme outils (i.e., pour agir sur l’environnement) et ceux utilisés comme instruments (i.e., pour percevoir l’environ¬nement). Cette distinction est très ancienne et remonte, selon Moulin (2003), à Descartes, lorsque ce dernier fait une analogie entre les sens et les instruments (l’œil peut être assimilé à une lentille qui, en retour, peut être assimilée à un œil). Historiquement, Baudet (2003) souligne que, si la science moderne se forme au XVIe siècle, c’est à l’aide d’instruments nouvellement conçus. La scolastique médiévale tournait les savants exclusivement vers les livres et le discours, et les ingénieurs, catégorie sociale montante, vont, par leur contact direct avec la matière, l’emporter sur les premiers. Cela s’est réalisé par l’instrumentation (i.e., l’utilisation plus systématique d’instruments pour des mesures les plus précises possible) à des fins de connaître le monde. Cette distinction outil/instrument a été réaffirmée par Simondon (1958) et reprise notamment par Bruillard (1998) pour caractériser les artefacts de l’informatique éducative.
Les outils sont donc des objets spécifiques. Gibson (1986) précise qu’on peut les attraper, les porter, les manipuler. Les outils peuvent d’un premier abord être considérés comme de simples objets, faisant partie de l’environnement ; ils deviennent des outils – des extensions de la main – à partir du moment où on les empoigne. Un outil est conçu pour rationaliser l’action (e.g., un tournevis est conçu pour bien visser et, s’il ne visse pas bien, il en perd son caractère d’outil), bien que, toutefois, il est inexact de dire que tout outil est nécessairement optimal : son évolution s’étant réalisée selon de nombreuses contraintes sociales, économiques et techniques, le résultat n’est pas forcément optimal selon ces différents paramètres (e.g., les standards en informatique, comme Windows, et en vidéo domestique, comme VHS, se sont imposés sans pour autant être les outils existants les plus performants).
Icône d'outil pédagogique Réflexivité
Lisez l'article sur les outils issu de Wikipédia ci-dessous.

Outil

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Page d'aide sur l'homonymie Pour les articles homonymes, voir équipement (homonymie).

Un outil est un instrument utilisé par un être vivant directement ou par le truchement d'une machine afin d'exercer une action le plus souvent mécanique ou thermique sur un élément d'environnement à traiter (matière brute, objet fini ou semi-fini, être vivant, etc). Il améliore l'efficacité des actions entreprises ou donne accès à des actions impossibles autrement. Beaucoup procurent un avantage mécanique en fonctionnant selon le principe d'une machine simple comme par exemple le pied-de-biche qui exploite le principe du levier.

L'outil peut être compris comme un prolongement de la main, du corps, un intermédiaire d'action, voire comme une prothèse dans le sens où il remplace (ou même crée) un membre ou un organe[1]. Pour Michel Serres, l'homme est un animal despécialisé et l'outil qui prolonge sa main le spécialise particulièrement.

Selon cette définition, outil serait quasiment synonyme d'objet technique. Toutefois, le langage courant réserve ce terme aux objets portables, interchangeables : ainsi, la faux est un outil, mais la moissonneuse est une machine, la perceuse électrique portable est un outil, mais la perceuse à colonne d'établi est déjà une petite machine-outil.

Le domaine d'application limite également l'usage du terme outil :

Toutefois ces limitations sont peu précises, le terme outil reste un terme du langage courant pouvant difficilement s'utiliser pour définir une catégorie technique précise.

Par extension, le terme outil peut s'appliquer à des outils virtuels :

  • on appelle outil informatique, les applications d'envergure limitée à une tâche spécifique,
  • on appelle outil mathématique une notion utilisée de façon récurrente pour faire aboutir des raisonnements ou résoudre des problèmes.
  • la notion d'« outil de travail » fait référence aux installations professionnelles d'un entrepreneur.

Sommaire

Pérennité

Le choix d'une matière ou d'une forme pour un objet finalisé, afin de le rendre apte à remplir sa fonction, n'en fait pas pour autant un outil. Un clou, par exemple, objet finalisé à la forme étudiée, fabriqué en matière had hoc, n'est pas pour autant un outil, par contre le marteau qui l'a planté en est un. L'outil, est un objet qui après avoir servi, revient dans la boîte à outil. Le clou, quant à lui, reste dans l'objet dans lequel il assure une liaison.

Les outils rudimentaires ou primitifs supportent mal cette caractéristique. Le promeneur qui ramasse une noix sur le chemin et qui la casse avec une pierre a-t-il utilisé un outil ? Pourtant, bien qu'abandonnée, ne revenant dans aucune boîte à outils, la pierre a gardé sa capacité "casse-noix" mais elle est "définalisée". Une noix rencontrée plus loin utilisera une autre pierre. Si les pierres se font rares, le promeneur conservera celle qu'il aura fini par trouver, et là on a déjà un début d'outil, alors qu'avant, tout au plus peut-on parler d'instrument.

À l'autre extrémité, le système économique de consommation tente de rendre l'outil le plus éphémère possible. Le « jetable » en retournant à la poubelle plutôt que dans la boîte à outils rend la caractérisation difficile…

L'outil de toutes façons vieillit et finit à la poubelle, par ce qu'on peut appeler d'une façon générale l'usure. Usure plus ou moins rapide : du ciseau dont la lame diminue à chaque affûtage, mais qui dure des années, à la ceinture de sécurité des voitures qui "s'use" (se distend définitivement) à la première sollicitation.

L'outil et les animaux

Une femelle gorille utilisant un outil (ici un bâton) pour se stabiliser dans une zone marécageuse et ainsi ramasser de sa main libre des herbes aquatiques (2005)

Beaucoup d'anthropologues considèrent que l'usage d'outils, facilité par la bipédie, a joué un rôle déterminant dans le développement de la lignée humaine.

Toutefois l'observation montre que différentes espèces d'animaux (principalement de l'ordre des primates dont font partie les humains, mais aussi des oiseaux, les loutres de mer et ainsi que quelques insectes comme la fourmi couturière -Œcophylla- ) en utilisent.

Ainsi on a pu observer des singes utiliser :

  • des bâtons pour attraper des fruits, des insectes ou mesurer la profondeur d'une mare pour savoir s'ils peuvent la franchir
  • des cailloux pour casser des noix ou des coquillages

Toutefois, il ne s'agit que d'outils rudimentaires, circonstanciel et non pérennes, donc plutôt simplement d'instrument, comme indiqué au paragraphe précédent. Mais:

  • L'habitation de nombreuses espèces animales constitue une véritable fabrication finalisée, parfois pérenne comme le nid de certains oiseaux (qui retrouvent leur nid d'une année sur l'autre)
  • les barrages de castor peuvent difficilement être considérés "outils rudimentaires": bien qu'ils le soient d'un point de vue fonctionnel, ils sont pérennes et surtout entretenus.

L'outil et l'humain

Seul l'humain fabrique des outils sophistiqués, les conserve entre deux usages et les fait évoluer dans le temps. On parle parfois d'Homo faber pour souligner cette caractéristique essentielle de l'homme.

Les armes sont certainement parmi les premiers outils, que l'Homme ait fabriqué. Outre leur importance intrinsèque pour la survie et la protection de l'espèce, cette classe d'outils a la particularité d'être utilisée en marchant ou en courant, face à un ennemi ou à la poursuite d'une proie, donc debout, alors que les autres outils primitifs ne pouvaient être utilisés qu'en position assise ou du moins statique.

Ainsi, la station debout, la spécialisation des membres, et le développement de la main de l'Homme, sont peut-être liés à l'aptitude à la violence de ses ancêtres (ceci est une hypothèse discutée, voir par exemple la théorie de l'origine côtière de l'homme, qui constitue une autre hypothèse).

Depuis qu'ils vivent, en groupe, puis en société, les humains se sont partagés les tâches et donc spécialisés en fonction souvent de leur aptitudes naturelles ou des besoins du moment. Cette organisation a permis à l'humanité de conserver, de divulguer, et donc de faire évoluer les techniques de fabrication des outils.

L'outil est une marque de la sédentarisation des peuples. Le nomadisme impose une restriction en volume et en quantité d'objets à transporter. Il est donc vraisemblable d'imaginer que le passage de chasseur-cueilleur à celui de l'agriculteur ou éleveur ce soit produit dans la même période. On peut effectivement penser que l'agriculture a nécessité des outils facilement volumineux.

Pour Jacques Grinevald, la révolution carnotienne qui entraîne le basculement dans une société thermo-industrielle avec l’utilisation massive de l’énergie fossile (charbon puis pétrole)[3] constitue un tournant décisif. Désormais la « puissance du feu » permet l'avènement d'une machine nouvelle, construite autour d'un moteur et qui constitue une bifurcation dans l'histoire de l'outil, en permettant de s'affranchir de la force motrice de l'homme ou de l'animal.

L'outil est un moyen qui permet à son utilisateur un rapprochement avec son désir. Nous sommes passés des outils qui sont un rapprochement de nos mouvements (la massue, le laser, etc.), à des outils automatisés pouvant fonctionner sans la présence de l'Homme (les robots, les machines-outils, ou les ordinateurs) prolongeant ainsi notre volonté.

Vu que le plaisir provoque un apaisement en nous, l'accomplissement de celui-ci est facilité par l'outil. Ainsi, l'Outil Suprême serait celui qui à l'extrême : « ferait ce que l'on voudrait en appuyant juste sur une touche ». Cette volonté d'accomplissement liée au désir est un principe qui a fait la force de l'Homo sapiens et sans doute ses ancêtres.

Lieux culturels consacrés à l'outil

Notes et références

  1. το ὄργανον signifie d'ailleurs en grec 'outil'.
  2. le mot outil vient du bas latin usitilium, corruption du latin classique ūtensilia.
  3. J.Grinevald, « La révolution carnotienne : thermodynamique, économie et idéologie », Revue européenne des sciences sociales, n°36, 1976 in Alain Gras – Fragilité de la puissance.

Voir aussi

Voir « outil » sur le Wiktionnaire.

 

Liens externes

Ce document provient de « http://fr.wikipedia.org/wiki/Outil ».

Cet article est régi pour les droits associés par la licenceLicence de documentation libre GNU. Utilise du matériel provenant dearticle"outil".

Régi par la licence Creative Commons Attribution Non-commercial Share Alike 3.0 License

Cours de Ph. Dessus - UE 26 - LSE/UPMF Grenoble